Une addition kilométrique [La Libre Belgique]
Une addition kilométrique
Gilles Toussaint, 24 juillet 2009, La Libre Belgique
Les aliments parcourent parfois de longues distances pour rejoindre nos assiettes
Voilà un haché de régime qui vaut son pesant de carbone, s'étonne un lecteur à la découverte de l'étiquette qui figure sur un emballage de viande de porc récemment achetée dans son Delhaize. Selon celle-ci, en effet, avant de finir dans son frigo, l'animal en question aurait parcouru près de
Chez Delhaize, on répond avoir déjà été contacté à ce propos et l'on indique qu'il s'agit en fait d'une erreur d'étiquetage limitée à un lot restreint de produits. Erreur rapidement corrigée. Depuis plusieurs années, insiste la porte-parole, Delhaize Belgique a fait le choix stratégique de donner la préférence aux produits belges, à prix et qualité équivalents. "Notre viande de porc est d'origine belge à 99 %. Concernant la viande de bœuf, 90 % est d'origine belge. La viande de poulet ainsi que la viande de lapin d'élevage sont quant à elles 100 % belges." Et de préciser que légalement, ces informations de traçabilité (pays de naissance, d'élevage et d'abattage) ne doivent pas apparaître sur de la viande porc.
Chercheur à l'Université de Liège, Pierre Ozer a, à plusieurs reprises, publié des enquêtes sur les distances étonnantes parcourues par les produits alimentaires que l'on peut acheter dans nos magasins. Sans remettre en cause les explications de Delhaize, il s'étonne néanmoins d'une telle erreur d'étiquetage quand on sait à quel point les réglementations mettent l'accent sur la traçabilité des aliments.
Mais bien au-delà de ce cas particulier, explique-t-il, on peut trouver dans les supermarchés belges, à prix souvent très serrés, de la viande provenant des quatre coins de la planète : un steak de bœuf ou un morceau de lièvre argentins (
Plus surprenant encore, entre novembre 2006 et février 2008, Pierre Ozer a procédé à un recensement systématique d'une série de fruits et légumes frais disponibles dans des grandes surfaces. Et là, surprise ! Sur un échantillon de quelque 1 674 produits, l'origine du produit frais est, soit absente, soit incorrecte, dans 29,6 % des cas. Depuis fin 2007, l'affichage des fruits et légumes frais doit pourtant mentionner leur origine si ceux-ci ne sont pas vendus en vrac. Ainsi a-t-il pu constater avec étonnement que l'on cultive apparemment en Belgique de la noix de coco, des mangues ou encore de la papaye Sur le plan environnemental, il n'y a pourtant pas photo. "En 2005, une étude allemande a mis en évidence que même si une pomme locale est conservée en frigo pendant un an, son impact CO2 reste moindre que la pomme importée de Nouvelle-Zélande."
Cette situation, conclut le chercheur, est la conséquence de la mondialisation qui s'est traduite par l'explosion des transports de marchandises par voie aérienne, le kérosène étant exempté de taxes. Aux yeux de Pierre Ozer, un premier pas consisterait à informer correctement le consommateur en apposant sur les produits alimentaires un logo (un avion rouge et un bateau bleu, par exemple) indiquant systématiquement et clairement le mode de transport utilisé pour l'acheminement de ces produits, accompagné de la mention claire et lisible du lieu de production. Histoire de l'inciter peut-être à opter davantage pour les produits locaux et de saison.
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